"encres et collages" Alain TOUSSAINT
15/02/2019>>>09/03/2019
"encres et collages" Alain TOUSSAINT
15/02/2019>>>09/03/2019
Cafe EUROPE à la galerie Meno Parkas -Kaunas- Lituanie.
Dans le cadre de la 18ème triennale de peinture de Vilnius
L’ENLÈVEMENT DE L'EUROPE - LA MÉTAPHORE COMME RÉSISTANCE
"L'Europe est avant tout un café plein de gens et de mots, où l'on écrit de la poésie, où l'on conspire, où l'on philosophe, ce café est inséparable des grandes entreprises culturelles, artistiques et politiques de l'Occident".
George Steiner
Steiner a magistralement résumé ce qui peut paraître naïf dans l'immédiat, fruit plus d'un vœu pieux que d'une réalité solidement établie. Pour lui, qui allait jusqu'à dire que sa patrie était partout où il avait une table et une feuille de papier pour écrire, tracer une ligne reliant tous ces cafés d'Est en Ouest et du Nord au Sud qui avaient contribué à forger l'idée minimale d'une conscience européenne commune était une vocation inaliénable dans sa longue vie intellectuelle. Je dis que son idée peut paraître naïve à l'heure actuelle car les tambours qui résonnent sont plus ceux de l'incertitude et de la désunion que le contraire. Ce n'est pas nouveau, l'Europe s'est construite et détruite de manière cyclique tout au long de l'histoire. J'ai parfois l'impression que l'Europe, plus qu'un espace géographique, est plutôt le bout d'une balance éternellement condamnée à équilibrer deux idées, ou plutôt deux désirs impossibles à concilier. L'une représente la construction d'un espace commun où les individus sont collectivement libres sur la base du respect de toutes les libertés individuelles. Un espace où la culture, la curiosité et le respect de toutes les cultures font des frontières des lignes tracées dans le passé. Un espace où la mer est un lieu de voyage, de connaissance et de communication, et non le cimetière de l'indignité qu'elle est aujourd'hui. L'autre idée représente l'Europe de l'autodestruction où le seul espace commun est celui représenté par les puissants de tous les pays, dont le seul but est de conserver le pouvoir, un but pour lequel ils n'ont - historiquement c'est prouvé - aucun problème à envoyer des générations entières à la mort en utilisant comme argument "c’est pour la Patrie" alors qu'en réalité ils veulent dire "c'est pour notre profit……stupide".
De la même manière que nous avons découvert au 20ème siècle que l'histoire n'avance pas en ligne droite, nous savons aussi que dans ce va-et-vient, ces avancées et ces reculs, il est important de défendre des idées pour permettre que les cycles négatifs soient maintenus les plus courts possibles. C'est ce que font depuis des années 4 Barbier et tout le groupe d'artistes avec lesquels il a travaillé et continue de travailler, persévérant dans une idée qui n'est rien d'autre que de maintenir cette table de café et cette conversation en plusieurs langues dont parle Steiner et où nous nous rencontrons de différents endroits, avec nos différentes langues, où nous sommes fascinés par les autres parce qu'ils sont différents, où nous tombons en admiration devant la lutte incessante pour rendre la métaphore visible, cette métaphore qui nous unit et nous fait sentir que nous partageons un espace commun, une patrie telle que définie par Steiner.
Agustin Fructuoso
Fondateur de KaNîBaL'HoPoX-Réseau européen d'espaces de création-